Conçu par Sora Composites et l’équipe Pescarolo Sport – alors encore engagée en LMP1 -, le prototype biplace ouvert est constitué d’une monocoque carbone permettant de limiter le poids à 820kg. Il est propulsé par un moteur V8 Corvette de 6,2 litres (le GM LS3 pour les intimes), placé en position centrale et pouvant être programmé à 200, 250, 300 et 360 chevaux. Bien que programmé sur 200 chevaux pour l’essai, cela reste impressionnant lorsque chaque équidé n’a que 4,1kg à propulser. La Pescarolo 02 possède également des suspensions inboard à double triangulation, des pneus slicks (parfaitement lisses, sans entailles), une boite séquentielle SADEV à 6 rapports avec palettes au volant, et d’énormes appendices aérodynamiques pour plaquer la voiture au sol. La vitesse de passage en courbe promet d’être décoiffante vu l’appuis aérodynamique généré. Après avoir conduit une BMW Clubsport ou une VW Fun Cup comme voiture de course la plus rapide, la marche est grande.
Après un briefing présentant la voiture, les précautions à prendre ou les procédures lors de l’essai, il est temps de s’installer au volant. Là encore l’ambiance course est présente puisque ce n’est pas une assise réglable : il faut choisir parmi un assortiment de baquet de tailles différentes à placer directement dans la coque carbone. Lorsque le baquet est placé, il faut enjamber le ponton pour s’installer dans une position très inclinée. Particularité, le volant est à droite! Une fois assis, on se retrouve face à un tableau de bord réduit à sa plus simple expression. Dans la bulle de gauche se trouvent plusieurs commandes, dont le bouton de contact, le switch lançant la pompe à essence et le bouton de démarrage. Une fois solidement sanglé, il n’y a en face de soi que le volant en carbone, se limitant à deux poignées pour les mains et quelques boutons. Il n’y aura en effet pas besoin de bouger ses mains de ces poignées car la direction est ultra directe. Derrière ce volant se trouve un écran comportant plusieurs indications comme les tours-minutes, la vitesse engagée ou la vitesse de la voiture.
Le grand moment est arrivé : contact, allumage de la pompe, et démarrage. Le V8 s’ébroue juste derrière moi, et on me fait signe de m’élancer. Alors que la mise en mouvement est réputée compliquée sur les voitures de course à cause du sous-dimensionnement de l’embrayage, elle n’est ici pas trop complexe si le moteur est suffisamment haut dans les tours – bien plus haut que sur une voiture de route. Après avoir parcouru la longue ligne droite des stands, il est temps d’accélérer, calmement car les pneus sont encore froids, et de franchir pour la première fois la mythique passerelle Dunlop. Après avoir pris plus d’un tour à chauffer les gommes, je peux augmenter progressivement la cadence et essayer d’extraire un maximum de cette Pescarolo 02.
Le prototype est muni d’un contrôle de traction de course, comme en possède les GT3, mais n’est pas équipé d’ABS. Je commence donc par jauger les freins, équipés de disques en acier. La pédale est très dure et sans assistance, elle nécessite donc de taper dedans pour obtenir toute la puissance de décélération. On ressent cependant clairement lorsque les roues se bloquent, et leurs limites sont très lointaines.
La deuxième chose à jauger est le grip en virage. Lorsqu’on conduit une voiture avec de l’appui aérodynamique pour la première fois, il faut intégrer une chose un peu contre nature : au plus la voiture ira vite, au plus elle sera plaquée au sol et donc au plus elle adhèrera. Il faut donc se forcer à moins ralentir la voiture en entrée de virage et emmener plus de vitesse dans la courbe. Le proto est d’autant plus collé au bitume, tourne beaucoup mieux et cela permet d’accélérer plus tôt et plus fort. Revers de la médaille dans un virage lent, l’absence de vitesse et donc d’appuis rend la voiture moins adhérente. J’ai mis quelques tours à faire suffisamment confiance à l’auto pour rentrer plus fort en courbe, et même à la fin de l’essai je n’étais pas encore aux limites.
Si la direction est très lourde et très directe, elle informe en 4K sur ce qui se passe sous les roues et sur le niveau d’adhérence. Associée au faible poids et à la rigidité du proto, tout cela rend la Pescarolo très intuitive. La voiture est bien équilibrée et distille beaucoup de confiance à son pilote, contrairement à ce que l’on pourrait croire.
Dans mon dos, le V8 Corvette est l’ami sur lequel on peut toujours compter. Il ne monte pas très haut dans les tours, mais il aura toujours une réserve de couple à offrir, peu importe le régime. Cela permet plus de souplesse si le virage est pris trop lentement pour la vitesse sélectionnée ou parcouru une vitesse trop haute. Mais c’est évidemment dans la moitié supérieure du compte-tour qu’il s’exprimera au mieux, avec une sonorité gutturale typique des gros V8 d’Outre-Manche.
Les limites de la voiture sont si lointaines que je n’ai pu que les effleurer après 30 minutes d’essai. Extraire la quintessence de ce genre de prototype demande un métier et une expérience que je n’ai pas encore : près de 3 secondes me séparent encore du meilleur temps. Les vitesses de passage en courbe sont assez incroyables, et essayer la voiture lorsqu’elle développe sa puissance maximale doit rendre l’expérience plus dingue encore.
Après avoir débriefé sur l’essai avec l’instructeur, pilote professionnel en GT3 à ses heures, je ne peux m’empêcher de jalouser fortement ceux qui ont la chance de conduire régulièrement ce genre d’engin, et surtout de faire la course contre d’autres avec…
Encore un grand merci à l’ACO pour cet essai, ainsi qu’à Dominique Breugnot pour ses photos! Voici ci-dessous une partie de l’essai en caméra embarquée (avant que la batterie de la GoPro ne me lâche…).